Politique idées

Toute ta journée est chronométrée. Tes pauses sont chronométrées, même pour aller aux toilettes.
Le samedi, nous avions un quart d'heure (toujours chronométré) pour déjeuner. Je vous raconte pas le branle bas de combat vers le micro-ondes.
Trois minutes max par appel.
Sur ton écran, tu as des graphiques en temps réèl. Ta moyenne de "promesses de dons" passe au rouge dès que tu t'éloignes trop du pourcentage demandé. Tu vois également en temps réèl la moyenne des personnes qui travaillent avec toi.
Non seulement tu te fais régulièrement hurler dessus par les pauvres gens qui se font harceler et pensent que c'est de ta faute, mais en plus un ou deux gardes chiourmes passent dans les rangs vérifier les satanées statistiques.
Quand je dis des gardes chiourmes, c'est parce que leur job EST d'être le plus menaçant et autoritaire possible. D'ailleurs ils sont souvent eux même menacés par leur hiérarchie, alors au fond je les comprend un peu. Si nos pourcentages sont trop faibles, ils dégageront comme nous.


Moi qui était sur la campagne du Secours Catholique, j'avais souvent au téléphone des personnes âgées, malades, venant de perdre leur conjoint, bref des gens qui ont besoin de parler, d'autant plus qu'ils s'imaginent que tu es une bénévole catho. Mais non, l'important, c'est de leur soutirer un maximum d'argent.
"si le donateur est mort, arranges toi pour qu'un membre de la famille reprenne le flambeau".
"Si ils te disent qu'ils n'ont pas d'argent, propose leur l'aide du secours catholique. Si ils refusent, c'est qu'ils ne sont pas si à bout que ça, alors ne les lâche pas".

Je dévie un peu du sujet, mais en plus des conditions de travail, j'ai aussi été choquée par le rapport humain qui se dégage de tout cela. Pendant quelques semaines, mon travail a été de mentir, de soutirer de l'argent à des personnes honnêtes par des moyens immoraux, de manipuler leur bonté d'âme comme si la volonté d'aider son prochain était une marchandise.